Biennale

L’Utopie des territoires

Vue de la Biennale d'art et d'architecture, 2022 © Martin Argyroglo
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Le premier geste fort de cet événement est celui de s’inscrire dans l’espace public, lieu où se jouent les inégalités de genre, les masculinités hégémoniques, la banalisation du harcèlement des femmes et les stratégies d’évitements. Par cet acte, nous voulons participer aux nouvelles dynamiques de démocratie participative telles que les marches de femmes.

Si la géographie de genre à démontré que l’espace urbain est un terrain sexué où les femmes ont toujours entretenu des rapports complexes avec la ville, cette Biennale se veut un espace d’appropriation symbolique dans lequel les œuvres d’artistes et d’architectes esquissent de nouvelles pratiques urbaines et s’inscrivent matériellement dans l’espace de la ville,ses lieux patrimoniaux, ses places, ses points de sociabilités et de loisirs. En outre, cette Biennale entend cultiver la capacité des œuvres à habiter la ville et à se mêler aux pratiques quotidiennes. Dans la perspective d’une expérimentation à l’échelle du réel, nous souhaitons que l’œuvre fasse événement en dehors des espaces qui sont traditionnellement dédiés à l’art.

 

Commissariat : Marine Bichon, Abdelkader Damani et Nabila Metaïr


Lieux d’expositions à Vierzon


Artistes et architectes

Ana María Arévalo Gosen

Partagée entre son Venezuela natal et l’Europe, Ana María Arevalo Gosen étudie la photographie à l’ETPA, à Toulouse, à partir de 2011, après des études en sciences politiques. C’est à la fin d’un stage avec Jacob Aue Sobol, à Hambourg, qu’elle confirme sa volonté de questionner la société avec une approche documentaire.

Días Eternos, 2017-2022
[Jours éternels]

La prison des femmes au Venezuela, au Salvador et au Guatemala : architecture patriarcale, nostalgie inassouvie des êtres chers et maternité fracturée.
« J’utilise la photographie comme un outil de défense pour les droits des femmes. Le projet Días Eternos a débuté dans mon pays natal (le Venezuela) puisque la condition des femmes y est l’une des causes profondes de la crise qui touche également la région de Caracas, où je suis née. L’emprisonnement d’une femme, dans des conditions qui la privent de liberté, ne s’arrête pas avec elle, mais se répercute de génération en génération. J’ai étendu ce travail à deux autres pays, au Salvador, en explorant la structure des gangs comme autre type de prison, et au Guatemala en me concentrant principalement sur les communautés indigènes. Mon intention est de développer Días Eternos dans toute l’Amérique Latine pour créer un impact durable. » A.M.A.G

Vue de la Biennale d'art et d'architecture, 2022 Agence d'architecture Bientôt - SHAB association - Surfaces Habitables, Permis de construire, 2022 © Martin Argyroglo

Agence d'architecture Bientôt - SHAB association - Surfaces Habitables

L’agence Bientôt est un groupe d’architectes installé·es à Nantes et à Vierzon intéressé.es par les questions interdisciplinaires en architecture, notamment celle de la réhabilitation expérimentale et de réemploi. En 2020 ils fondent notamment l’association PRISM devenue SHAB, une structure proposant des ressources théoriques et matérielles ; elle a des fins de création, de recherche, de production et de diffusion ; l’association transmet, accompagne, promeut, édite et diffuse auprès du grand public et des collectivités locales, ainsi qu’à toute personne et structure intéressée par les projets et les recherches dans les domaines de l’architecture, de l’urbanisme, du paysage, du design, de la sociologie, de l’évènementiel, de l’image, du son, de l’écriture, de la recherche et du graphisme.

Interview des architectes

Permis de construire, 2022
Panneau PVC, plot de béton

Dans le cadre de la Biennale, l’Agence d’architecture Bientôt entend participer à une nouvelle narration de la ville en partageant à tous·tes des utopies concrètes issues de l’imaginaire commun et construites autour d’un modèle de société féministe attentif, inclusif et respectueux de l’environnement. L’installation qu’elle réalise est composée de plusieurs panneaux d’affichage de permis de construire. Détournés, ces derniers reprennent néanmoins les codes des panneaux administratifs réels, pour faire état des projets architecturaux et urbains. Si ces outils ont pour but d’informer les riverain·es, ils peuvent aussi devenir un support de discussions au service d’une fabrication plus démocratique de la ville. Outre l’enjeu d’ouvrir les imaginaires architecturaux de chacun·e, il est également question de les rendre lisibles et d’en faire une invitation au débat architectural et urbain.

Vue de la Biennale d’art et d’architecture, 2022
Agence d’architecture Bientôt – SHAB association – Surfaces Habitables, Permis de construire, 2022
© Martin Argyroglo

Vue de la Biennale d'art et d'architecture, 2022 Katharina Cibulka, Tant que mon anatomie déterminera mon autonomie, je serai féministe, 2022 © Martin Argyroglo

Katharina Cibulka

Katharina Cibulka est née en 1975 à Innsbruck en Autriche. Après avoir étudié les Beaux-Arts à Vienne, elle intègre la New York Film Academy puis la School for Artistic Photography à Vienne. Depuis presque vingt ans, elle développe une pratique pluridisciplinaire, alternant entre le film, l’installation, la performance ou la photographie. Sensible aux problématiques sociales qui portent le poids des traditions ou de la bienséance, l’artiste interroge les habitudes humaines et examine la relation ambiguë de l’individu au monde, soulignant l’équilibre dangereux entre les désirs subjectifs et les projections sociétales.

Interview de l’artiste

Tant que mon anatomie déterminera mon autonomie, je serai féministe, 2022
Série d’installations SOLANGE #26

Sensible aux problématiques liées aux rôles socialement genrés et aux idées de la bienséance, l’artiste interroge les comportements humains et examine la relation ambiguë qu’entretiennent les individus avec leur environnement. Dans le projet intitulé en allemand SOLANGE, qui signifie « Tant que », l’artiste use des bâches antipoussière installées sur les chantiers de construction pour y inscrire des slogans en tulle, illustrant la nécessité persistante des revendications féministes. Avec son œuvre, elle investit le milieu masculin de la construction et se l’approprie, à la fois par le message social et par le procédé de la broderie historiquement attribué aux femmes. La singularité de cette œuvre réside dans cette phrase, fruit d’un travail collaboratif que Katharina Cibulka a mené au contact de féministes françaises et des Vierzonnais·es. Par cette première œuvre déployée sur la façade des anciens magasins de la Société La Française — occupés durant la Première Guerre mondiale par les femmes qui y confectionnaient des tentes — nous vous accueillons dans la Biennale infinie liberté, un monde pour une démocratie féministe.

Vue de la Biennale d’art et d’architecture, 2022
Katharina Cibulka, Tant que mon anatomie déterminera mon autonomie, je serai féministe, 2022
© Martin Argyroglo

Louisa Babari, Les Vigies, 2022. Biennale 2022. © Martin Argyroglo

Louisa Babari

Louisa Babari est diplômée de l’Institut d’études politiques et de l’Institut national des langues et civilisations orientales de Paris, en études contemporaines et section cinéma. Ses œuvres explorent le champ esthétique et les changements sociaux dans les pays anciennement colonisés, mais également le discours et la littérature des utopies socialistes et des mouvements de luttes anticoloniales. L’artiste a produit plusieurs essais et fait partie du collectif à l’origine de la revue Afrikadaa, qui interroge la production contemporaine africaine dans une perspective décoloniale. Son œuvre est protéiforme : vidéos, dessins, photographies, sculptures et installations diverses, notamment de l’archive familiale qu’elle réactive pour questionner ses pays d’origine, la Russie et l’Algérie.

Les Vigies, 2022
Installation de huit collages

Louisa Babari s’empare de la façade de l’Usine La Française (le B3) pour l’habiller d’une relecture matrimoniale. Par le choix du titre et sous la forme de collages monumentaux, l’artiste rappelle le rôle historique des femmes en tant que témoins, actrices et sentinelles des grands bouleversements sociaux. Des vestiges gallo-romains aux grands ensembles, de l’habitat ouvrier à la question industrielle et territoriale, la présence des femmes articule chaque collage et instille une atmosphère indicible et onirique. En usant abondamment des postures canoniques des corps, employées dans l’art de la même manière que dans la publicité et les magazines féminins, Louisa Babari inscrit son travail dans une filiation artistique du collage en tant que technique subversive, particulièrement chez les artistes femmes qui ont œuvré à déconstruire le genre.

Interview de l’artiste

Vue de la Biennale d’art et d’architecture, 2022
Louisa Babari, Les Vigies, 2022
© Martin Argyroglo

Vue de la Biennale d'art et d'architecture, 2022 Flora Bouteille et Victor Villagagne, Le Nulle part et le quelque part d’autre, 2022 © Martin Argyroglo

Flora Bouteille & Victor Villagagne

Née en 1993, Flora Bouteille vit et travaille à Paris. Elle est diplômée de l’École nationale supérieure des beaux-arts de Lyon en 2018 et est intervenue lors d’une conférence-performance, avec Jacques Rancière à l’HIAP Suomenlinna (Helsinki, 2016) puis à La Bellone (Bruxelles, 2017). Son travail a notamment été présenté à l’Exhibition Laboratory (Helsinki, 2017), à la San Mei Gallery (Londres, novembre 2017), à la Project Room Gallery, en duo avec Iona Roisin (Helsinki, avril 2018). Elle a participé à l’exposition « Partout, mais pas pour très longtemps » au Centre d’échanges Perrache à Lyon ainsi qu’à la Biennale de Bolzano en Italie (2018) et a réalisé une performance au sein de l’(A)VOID Floating Gallery à Prague (2018) et au musée des Beaux-arts de Lyon (2019). Elle a obtenu le Prix de Paris 2018 et a fait partie des artistes exposés au 64e Salon de Montrouge (2019). Flora Bouteille a récemment participé à une résidence au parc Saint-Léger.

Le Nulle part et le quelque part d’autre, 2022
Série Températures. Film, 15 min

Flora Bouteille s’intéresse au potentiel de la catharsis, de l’exorcisme et des pratiques de transes expiatoires dans la performance. En parallèle, elle entame une série d’interviews portant sur les effets des NBIC —Nanotechnologies (N), Biotechnologies (B), Informatique (1) et Sciences cognitives (C) —, sur les relations humaines et interespèces. À travers ces recherches dont est issu le film, l’artiste questionne l’usage quotidien des machines et des intelligences artificielles, mais également leur impact corporel et psychologique, tant sur le plan cellulaire que social.
Réalisé selon une approche immersive, le fi lm est tourné dans deux environnements dissonants : un paysage réel capturé par l’artiste Victor Villafagne en Italie et un paysage fictif autour de la technicisation accélérée du corps, tourné en studio avec l’interprète Aurore Serra.

Vue de la Biennale d’art et d’architecture, 2022
Flora Bouteille et Victor Villagagne, Le Nulle part et le quelque part d’autre, 2022
© Martin Argyroglo

Vue de la Biennale d'art et d'architecture, 2022 Férielle Doulain-Zouari, D'une terre l'autre, 2022 © Martin Argyroglo

Férielle Doulain-Zouari

Férielle Doulain-Zouari est une artiste franco-tunisienne. À travers l’utilisation de techniques manuelles qui opèrent au présent, elle questionne les différentes cohabitations qui existent entre le monde naturel et l’artificiel. Elle interroge les manières de représenter matériellement la rencontre, la réconciliation et le dénouement de conflits (identitaires, contextuels…). Ses travaux prennent la forme d’installations, de sculptures, et de tissages de différentes factures. Ils sont liés à la vie quotidienne, s’inspirent de l’environnement, des éléments qui l’entourent (matériaux industriels, objets fonctionnels, plantes sauvages ou « adventices » …) et des systèmes de débrouille mis en œuvre au quotidien.

D’une terre l’autre, 2022.
Installation

L’œuvre de Férielle Doulain-Zouari rend hommage au passé industriel de la Ville de Vierzon, aux femmes et aux hommes qui y ont contribué. Dans cette installation, un tissage en fer forgé s’enracine dans le sol en terre laissant entrevoir des répliques d’outils usuels durant la période industrielle locale. Comme une « archéologie hors-sol » ou une ruine qui a subsisté au temps, cette œuvre lie le passé au présent en révélant le récit de la ville chevillé à celui de la terre. Manufacturé, chaque matériau employé fait référence à une strate historique : le fer forgé tissé, le verre prenant la forme des bousillés ou encore les outils en grès. Ce passé en fragments semble s’extraire au sol au fur et à mesure qu’il s’enfouit dans l’humus de l’Usine La Française.

Vue de la Biennale d’art et d’architecture, 2022
Férielle Doulain-Zouari, D’une terre l’autre, 2022
© Martin Argyroglo

Vue de la Biennale d'art et d'architecture, 2022 Sophie Berthelier - Véronique Descharrières, Le lieu des savoirs, 2022 © Martin Argyroglo

Sophie Berthelier - Véronique Descharrières

Architecte DPLG diplômée de l’École nationale d’architecture Paris-Val de Seine en 1984, Sophie Berthelier a travaillé au coté de Jean Nouvel pendant 8 ans. En 1992 elle fonde, avec Benoît Tribouillet, l’agence SBBT Architecture implantée à Paris et à Chartres. En 2012, elle obtient la médaille d’argent de l’Académie d’architecture. Sophie Berthelier reçoit plusieurs prix dont celui de Femme Architecte en 2017 puis devient membre de l’Académie d’architecture en 2019 et secrétaire générale en 2020.

Architecte et urbaniste, Véronique Descharrières partage ses activités entre l’agence BTuA Paris/NewYork, en tant qu’associée et codirectrice, et l’agence VEDEA qu’elle fonde en 2017 pour développer des projets liés aux disciplines du Vivant. Au sein de VEDEA, l’architecte défend l’idée d’une recherche s’appuyant sur l’intelligence collective et considère la nécessité d’explorer sa pratique comme une matière au croisement de plusieurs disciplines. Professeure invitée par plusieurs écoles et institutions, elle obtient la distinction de Chevalier des Arts et Lettres en 2012. En 2019, elle devient membre titulaire de l’Académie d’architecture de Paris.

Le Lieu des savoirs, 2022

La microarchitecture réalisée par le duo Sophie Berthelier et Véronique Descharrières révèle, par des détours volumétriques et architectoniques, le caractère industriel de l’Usine La Française (le B3). Dans cette réalisation, elles interrogent également la capacité d’une architecture à œuvrer pour la mutation des comportements, à habiter subtilement les lieux et impulser de nouvelles pratiques. Intitulée Le Lieu des savoirs, cette œuvre participe à jalonner le parcours mental des visiteurs et opère comme un lieu de rencontres, où s’invite notamment la notion de FabLab à travers l’expérimentation, l’exposition et les débats qui s’y déroulent. Pensé à partir d’un jeu d’intervalles et de transparence, le pavillon est habillé d’un exosquelette et organisé autour d’un noyau en gradins à double rangée, pouvant accueillir jusqu’à 40 personnes. Le lieu est investi par une cartographie pavillonnaire distribuée dans la ville de Vierzon à travers laquelle les deux architectes déploient des usages singuliers du territoire urbain et paysager.

Vue de la Biennale d’art et d’architecture, 2022
Sophie Berthelier et Véronique Descharrières, Le lieu des savoirs, 2022
© Martin Argyroglo

Vue de la Biennale d'art et d'architecture, 2022 Clémentine Chalançon, Sans titre, 2022 © Martin Argyroglo

Clémentine Chalançon

Née en 1995 à Lyon, Clémentine Chalançon est récemment diplômée d’un DNSEP à l’École Supérieure d’Art et Design de Saint-Étienne, et partage sa production artistique entre photographie et peinture. Elle use ainsi de ses photographies comme sujet, peignant les paysages par le filtre de ses propres prises de vues. Son regard glisse dans la périphérie, dans les zones limites, les zones d’ombre, ces zones intermédiaires, ces frontières qui en réalité, constituent le lieu de tous les possibles.

Sans titre, 2022
Fresque

Au sein du paysage de la Biennale intitulé L’Utopie des territoires, Clémentine Chalançon a investi deux lieux qui se font face, l’Usine La Française (B3) et le Jardin éponyme. Elle s’est intéressée aux murs, ces espaces ordinaires possédant cette même qualité d’empreinte, issue du lien qu’entretient le temps avec le vivant et la matière. L’artiste recourt à l’esthétique d’un artefact de l’heuristique — l’empreinte — pour l’appréhender au moyen de la technique a fresco, qui consiste à peindre sur l’enduit encore frais. À travers ces fresques, Clémentine Chalançon négocie la place d’un nouveau relief aux murs. Les motifs employés (taches, lézardes, mousses et lichens) sont les fragments de paysages observés et fantasmés, par lesquels elle exprime le rapport invisible au temps.

Vue de la Biennale d’art et d’architecture, 2022
Clémentine Chalançon, Sans titre, 2022
© Martin Argyroglo

Feminist architecture collaborative

feminist architecture collaborative est une entreprise de recherche composée de trois femmes. Gabrielle Printz, Virginia Black et Rosana Elkhatib maintiennent leur pratique astucieuse et leur profonde amitié à Brooklyn, New York, en visant à démêler la politique spatiale contemporaine des corps, intimement et globalement. Leurs projets traversent les registres théoriques et activistes pour localiser de nouvelles formes de travail architectural à travers des relations critiques avec des collaborateurs, à travers les continents et une définition élargie du designer.

Post-Fordist Hymen Factory, 2017
[L’Usine postfordiste de l’hymen]
Installation

Cette œuvre aborde les constructions de la virginité contemporaine à travers les registres juridiques, médicaux, culturels et cosmétiques, ainsi que la distribution d’une membrane artificielle vendue sous le nom de Virginity Hymen. L’hymen artificiel est un artefact prothétique insérable qui simule la rupture de l’hymen et alimente les notions persistantes de virginité. Dans cette œuvre conceptuelle, feminist architecture collaborative cartographie et répertorie la circulation mondiale de cette marchandise corporelle synthétique, depuis sa fabrication (souvent en Chine) jusqu’à ses points de distribution (l’Europe) et ses consommateurs visés (principalement des femmes au Moyen- Orient). Dans le prolongement de cette réflexion, le fi lm entend recréer des environnements affectifs dans lesquels les femmes subissent une hymnoplastie. Cette reconstitution incarne chez le collectif, un moyen de se rapprocher de l’expérience de chaque femme et observer le rôle de l’architecture dans l’organisation des risques liés aux injonctions autour de leur corps.