Patrick Bouchain

Théâtre du Centaure, Marseille, 2001-2002

« Camille et Manolo, un couple d’artistes cavaliers, avaient besoin d’un chapiteau pour mettre en scène et jouer Macbeth. Leur demande était si précise que j’ai proposé qu’ils soient leur propre maître d’ouvrage. Avec l’aide d’un jeune architecte, Goulven Richard, il s’est noué entre nous une relation de complicité, consignée dans des carnets comme autant de « mains courantes », collectant hypothèses, réponses techniques, et finalement toute l’histoire de ce chapiteau. […] La disposition circulaire, idéale pour les chevaux, était problématique pour les acteurs, obligés de s’adresser au public à 360 degrés. J’avais à l’esprit ce que j’avais observé en Côte d’Ivoire, au pays Lobi : les jeunes mariés reçoivent un terrain sur lequel ils tracent, en l’arpentant, le contour de la maison qu’ils souhaitent se construire. On édifie d’abord un mur de terre de 50 cm de hauteur, dans lequel on les laisse vivre un certain temps. S’il se confirme que le plan est bon, on élève progressivement les murs, jusqu’à obtenir une maison. J’ai proposé à Camille et Manolo de procéder ainsi. Les essais se sont fait grandeur nature, sur une plage de Camargue, en utilisant la pente des dunes pour tester l’inclinaison des gradins, la vue des spectateurs et le pas des chevaux. C’est ainsi qu’a surgie l’idée de rond et d’ovale entremêlés : une piste de cirque décentrée dans l’ovale permettait de placer le public entre les deux, faisant fusionner les dispositifs scénographiques circulaires et frontaux. Cette forme recomposait par hasard le sabot du cheval ! […] La toile devait être translucide pour percevoir le monde extérieur, mais le fabricant a, au dernier moment refusé de la vendre, au motif qu’elle vieillirait mal — ce que nous souhaitions précisément. Le chapiteau est devenu noir et opaque, fendu d’un disque de lumière exprimant les astres et le cosmos… Cet objet a une force très particulière, liée à Macbeth, avec pourtant une capacité à se transformer au fil du temps et des mises en scène » (Patrick Bouchain).

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