Patrick Bouchain

Le Channel, Calais, 2003-2007

Avec Loïc Julienne

« Ses élus disent souvent qu’elle est « la pauvreté généreuse », idée qui a guidé notre projet pour Calais. L’acte de construire pouvait-il réunir une population, ses élus, ses habitants et ses techniciens dans la réalisation d’un objet démocratique ? » (P. Bouchain) C’est au Channel que le chantier culturel et participatif comme moteur de cohésion sociale et d’appropriation d’un lieu trouve son expression la plus aboutie. Pour reconvertir ces anciens abattoirs en Scène nationale, l’agence, en collaboration avec Francis Peduzzi et l’artiste François Delarozière, mit en place une stratégie fondée sur la mise en scène de l’acte constructif, la diversité des métiers et des savoir-faire. Une véritable « cité de chantier » vit le jour, auto-construite avec des matériaux de récupération, ouverte à tous et fonctionnant comme un laboratoire. Les réunions de chantier s’y déroulaient la journée ; Le Channel y programmait des spectacles le soir. Toute personne active sur le site (entrepreneur, ingénieur, acousticien, étudiant) fut invitée à partager et transmettre son savoir spécifique sous la forme d’un cours. Emblème de cette approche chirurgicale et symbolique de l’architecture, « le four crématoire qui brûlait les carcasses d’animaux est devenu un cirque, seul endroit où les animaux sont d’égal à égal avec les hommes. » (P. Bouchain) Il laisse la place à une structure légère, un chapiteau modulable aux couleurs vives, pouvant accueillir jusqu’à quatre cents personnes. Adossés au mur d’enceinte, quatre pavillons s’alignent comme autant de manifestes « écologiques » : le « Pavillon des Plantes », conçu par Liliana Motta à partir de relevés botaniques ; le « pavillon de lettres » (de l’être), recouvert par l’artiste Joël Ducorroy de plaques minéralogiques figurant des mots choisis par les Calaisiens ; le 3e est l’œuvre de trois jeunes diplômés en architecture, construit « le plus économiquement possible » contre toutes les formes de gaspillage. Le dernier rend hommage aux cabanes alignées sur la plage de Calais, tolérées, mais illégales (compte tenu des lois sur la protection du littoral), suspendues dans un vide juridique.

partager sur ou