TAKK (Mireia Luzarraga et Alejandro Muino)

Allochtonous species, 2017

Le projet Espèces allochtones¹ s’intéresse aux notions d’espèce allochtone (désignant ce qui est originaire ou s’est formé dans un autre lieu que celui où on le rencontre) et d’espèce autochtone au sens biologique du terme. Ces concepts permettent de dresser plusieurs parallèles, que ce soit avec le champ des rapports sociaux, vis-à-vis de la prise de position sur l’élimination de certaines espèces considérées comme allochtones et la protection de celles vues comme autochtones, avec la justification des politiques européennes actuelles en matière de contrôle migratoire, la progression des gouvernements d’extrême droite, le Brexit, les catastrophes humanitaires, les phénomènes liés au réchauffement climatique ou l’anthropocène, ou bien avec la nécessaire redéfinition des outils disciplinaires de l’architecture que ces nouveaux scénarios impliquent.

À cet égard, le projet se matérialise par la création de deux « drapeaux-jardins » composés de plantes exotiques invasives (aussi bien pour la discipline architecturale que pour le paysage de la rue Jeanne d’Arc à Orléans), nous invitant à repenser la manière dont nous devons concilier l'architecture avec des questions telles que la protection des individus en situation de vulnérabilité et de précarité, les identités hybrides, la nécessité de construire des scénarios de co-dépendance, la création d’espaces accessibles et sûrs permettant la confrontation d’ intérêts sur un pied d’égalité pour l’ensemble des agents concernés (qu’ils soient humains ou non), ou le rapport entre ce que nous considérons comme nous appartenant et ce que nous voyons comme étranger. De même, le projet questionne la nécessaire extension des matériaux constitutifs de cette architecture, intégrant des éléments tant significatifs que non significatifs, naturels que culturels ou matériels que figuratifs. Ces réflexions nous invitent à envisager la production architecturale contemporaine comme une pratique de survie fondée sur une collaboration multi-espèces, et la culture en termes de pluralité et de diversité, plutôt que de concevoir l’architecture comme rien de plus que la construction de bâtiments auxquels on ajoute la dimension éco-politique des situations et des événements qui se produisent en leur sein – une éthologie des affects.

Takk

¹ Drapeaux : Détail de fleurs de la liste des mauvaises herbes en France publiée par l’Association de Coordination Technique Agricole (ACTA), mousse polyuréthane, peinture, bois et ficelles.

partager sur ou