OBRA (Jennifer Lee et Pablo Castro)

Indifferent Pavilion, 2017

Produite à l’occasion de la Biennale d’Architecture d’Orléans 2017, cette œuvre est un pavillon dessiné à partir d’une forme géométrique élémentaire, universelle, publique et ouverte à tous. À l’intérieur, les images défilent sur toutes les faces de l’hexagone telles des vues de paysages à travers des fenêtres. La rigueur des structures qui trament les écrans se confronte aux images insaisissables diffusées. C’est au cœur des paradoxes que le travail d’OBRA s’engage à fouiller le monde sans naïveté. OBRA s’inscrit dans la filiation des artistes et des architectes qui se sont intéressés à la question du vide, du silence, là où se joue les choses en creux :

« Il semblerait que l’architecture soit en train de se lancer dans une quête louable d’anonymat ; quête qui, peut-être de façon contre-intuitive, mènera la discipline à envisager à nouveau la ville comme une « œuvre d’art collective ». L’anonymat que l’on imagine ici s’affirme à travers le choix de rythmes réguliers, l’insistance sur des formes simples et répétitives et l’ennui serein que produit l’usage de dimensions répétées à l’infini. De nos jours, le rôle de la forme architecturale se limite le plus souvent à étayer l’épidémie mondiale d’individualisme égocentrique. On ignore pourquoi. Peut-être s’agit-il simplement de la forme logique que produisent les stades avancés du système économique et social dans lequel nous vivons. Si nous voulons échapper à cet imaginaire architectural au service d’une pensée égoïste, nous devons nous intéresser à une forme alternative de « beauté » architecturale. Si la forme « intéressante » est associée à l’individualisme et à une conception élitiste de la « qualité », alors ce qui nous paraît ennuyeux et inintéressant se présente comme l’alternative viable qui sauvera l’architecture en tant que forme culturelle. En s’intéressant à cette forme étrange, cette sorte de « dialectique négative » ou cette expression de l’inexpressivité, l’« humanité » sera peut-être encore en mesure de réfléchir à ses perspectives d’avenir sans naïveté ou hypocrisie. Dans cet ordre d’idées, nous voyons « Marcher dans le rêve d’un autre » comme l’incarnation des expressions fécondes d’un inconscient collectif hypothétique qui n’aurait pas conscience des propriétés imbriquées et serait donc, en substance, anonyme. D’une certaine façon, notre contribution ne pouvait imaginer mieux que cet anonymat partagé, cette simplicité structurelle et cette philosophie indistincte des œuvres architecturales représentées. Trois paires de murs de 5 mètres de haut espacés d’environ 5,5 mètres délimitent un espace hexagonal. Un diaporama d’œuvres architecturales est projeté à partir de chaque mur sur celui d’en face. Les projecteurs, braqués face à face de part et d’autre de l’enceinte, projettent des groupes de neuf images de 30 cm x 60 cm, soit des grilles de trois images par trois. Les neuf images visibles à tout moment sur chacun des murs constituent une plus grande image, comme un paysage vu à travers une fenêtre à neuf carreaux ou comme l’incarnation d’une image quadrillée à laquelle on aurait appliqué la logique cartésienne comme seul espoir de consensus possible entre ses couches de diversité. Un banc est installé contre le périmètre hexagonal et un catalogue raisonné, quelque part dans la pièce, donne un aperçu des perspectives d’anonymat inhibé en architecture. » (OBRA)

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