Kokkugia (Roland Snooks, Robert Stuart-Smith)

Babi Yar Memorial, 2010-2012

Sur un paysage enneigé traversé par des lignes fluctuantes, s’élève un monolithe minéral éclaté et comme dévoré en son centre par une coulée de bronze. La proposition de Kokkugia pour le concours du mémorial de l’holocauste de Kiev est un « monument inverti », qui à la contemplation substitue l’immersion dans un environnement où convergent nature et artifice. La masse compacte occupée par les galeries d’exposition, à laquelle le porte-à-faux donne l’apparence d’un équilibre précaire, contraste avec l’excès de matière qui caractérise le lieu même du mémorial ; les architectes le conçoivent en termes d’intensité plastique et spatiale, sans visée métaphorique aucune. Les motifs tridimensionnels complexes résultent de procédures d’auto-organisation, tout comme les tracés paysagers qui émergent de l’interaction d’agents au sein d’un champ « chargé » avec des propriétés magnétiques et électriques. Kokkugia fait ici usage des outils numériques afin de générer des effets et des affects, dans cette tension qui provient de la confrontation du formel à l’informe et de la sobriété à l’excès.

Emmanuelle Chiappone-Piriou

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