John Hejduk

Architecte (1929 - 2000)

John Hejduk est une figure à part de l’histoire architecturale américaine et internationale de la seconde moitié du XXe siècle. Essentiellement théorique, son œuvre se fonde largement sur le dessin, conçu comme acte constructeur en soi et outil privilégié d’une réévaluation critique de l’histoire de l’architecture et de l’exploration des questions de forme, d’autonomie et de réciprocité. Au début de sa carrière, Hejduk est reconnu comme l’un des « Five Architects » ou « The New York Five », du titre de l’exposition montée en 1969 au MoMA, où il figure aux côtés de Michael Graves, Charles Gwathmey, Richard Meier et Peter Eisenman. Ces architectes partagent alors une démarche fondée sur la reconnaissance de l’héritage moderniste et la réévaluation de ses modèles, parmi lesquels les villas de Le Corbusier et le rationalisme italien. C’est par le dessin, notamment dans la série des Diamond Houses (1962-1967), qu’Hejduk cherche à établir une syntaxe architecturale nourrie du vocabulaire moderniste mais s’en détachant au profit de jeux mathématiques fondés sur l’exploration de figures géométriques telles le cube et la grille. A partir de 1979, époque à laquelle il entame son travail sur les Masques, Hejduk introduit progressivement dans ses projets la possibilité d’une narration poétique. Il évolue alors vers une pratique au fort caractère fictionnel, au croisement de plusieurs disciplines (médecine, littérature et peinture) capables de générer une architecture potentielle. Plus abstraite et plus intime, la recherche d’Hejduk semble alors toucher ce qu’elle a toujours cherché à atteindre : l’idée d’une condition proprement architecturale. Les machines et les dispositifs architecturaux qu’Hejduk imagine sont pour certains réalisés par des étudiants, architectes ou simples amateurs, à partir de ses dessins, comme Security (1989), bâtiment de sécurité mobile figurant dans le projet Berlin Masque / Victims, conçu pour célébrer à Berlin la mémoire des victimes de la Gestapo et réalisé à Oslo par des étudiants de l’Ecole d’Architecture. Hejduk est également reconnu pour son rôle de pédagogue, qu’il mène sans interruption pendant près de cinquante ans et qui le place au cœur de l’activité architecturale et critique américaine. Depuis ses débuts à l’Université du Texas, pour lesquels il est associé aux « Texas Rangers » (groupe de professeurs influents, parmi lesquels on compte également Colin Rowe et Werner Seligmann), jusqu’à la Cooper Union de New York, il a formé plusieurs générations d’architectes, parmi lesquels Daniel Libeskind et Elizabeth Diller. Il a renouvelé l’enseignement de l’architecture en y introduisant notamment des exercices de composition abstraits, à la croisée des disciplines architecturales et littéraires.

John Hejduk est un architecte et professeur américain né à New York en 1929. Il étudie à la Cooper Union School of Art and Architecture, à l’Université de Cincinnati et à l’Harvard Graduate School of Design, dont il sort diplômé en 1953. Il travaille au sein d’agences renommées, telles I.M. Pei and Partners et A.M. Kinney and Associates, avant d’entamer une longue carrière dans le professorat. Il enseigne d’abord à l’Université du Texas avant de retourner à la Cooper Union en 1964. Nommé doyen en 1975, il gardera ce poste jusqu’à sa mort et marquera profondément l’école en la transformant tant dans la forme – il restructure le bâtiment en 1975 – que sur le fond. Si John Hejduk a peu construit, ses publications constituent le cœur de son œuvre, comme Mask of Medusa : Works 1947-1983 (1985) ou Bovisa (avec Rafael Moneo, 1988). Il réalise quelques édifices, comme les appartements-jardins et la tour de Kreuzberg à Berlin (1988), ainsi que des installations temporaires tirées de ses dessins, comme The House of the Suicide (1991), présentée à Prague à la demande de Vaclav Havel.

Emmanuelle Chiappone-Piriou

partager sur ou